Loïc Lantoine, un seul nom pour un duo composé de l’auteur Loïc Lantoine et du contrebassiste François Pierron. Il y a 3 ans, ils ont fait des débuts très remarqués à coup de poésie brute et engagée. Aujourd’hui, ils reviennent avec un nouvel album toujours aussi percutant, Tout est calme. Une nouvelle occasion pour Loïc Lantoine de nous faire partager ses sentiments sur le monde… comme l’ont toujours fait les poètes.
- RFI Musique : Contrairement au premier album, de nombreux instruments et musiciens se sont invités sur ce disque…
- Loïc Lantoine : On construit nos albums au fil des rencontres : à chaque fois qu’on croise des gens qui nous plaisent, on joue avec eux. En général, ça débouche sur de belles amitiés comme avec Denis Charolles. On s’est rencontré quand on enregistrait le premier album. Il était passé dans le studio et avait bien déliré en entendant nos bêtises. On lui a dit de repasser le lendemain pour faire une chanson et on ne s’est plus jamais quitté. C’est quelqu’un d’important parce qu’il ose tout. Il n’a peur de rien et fait plein de choses différentes.
- Vous n’en seriez pas capable ?
- Pour l’instant, on essaie plutôt de varier les endroits où l'on joue. Par exemple, on fait des concerts dans des comités d’entreprise, des prisons, des petits bistrots et le mois prochain dans un hôpital psychiatrique. C’est important d’aller voir partout. Les salles de spectacles ne sont pas accessibles à tous alors j’essaie toujours de penser à tout le monde.
- Vos textes sont toujours aussi soignés. D’où vous vient cette passion pour les mots ?
- Quand j’étais jeune, je lisais beaucoup de poésie. J’aimais Supervielle, Norge, Michaux, pleins de poètes différents. Ce n’est que bien plus tard que j’ai découvert la chanson : j’ai grandi dans les années 80 et à cette époque, la chanson était ringardisée. J’ai un copain qui m’y a initié et rapidement j’ai découvert Allain Leprest. Il m’a mis le pied à l’étrier et de là est née une belle amitié.
- Quand on écoute vos textes, on a l’impression que chanson est synonyme de contestation…
- Logiquement, mes préoccupations se retrouvent dans ce que je fais. Mais je sais malgré tout quel est mon métier : je dois avant tout faire passer un bon moment aux gens. Je n’oublie jamais que je ne suis qu’un bouffon, ce qui est d’ailleurs assez confortable quand on veut s’engager car on a le droit à l’erreur. Ce n’est pas le cas pour un militant d’association ou de parti politique. Moi, on ne me reprendra pas. Si on n’est pas d’accord avec moi, il n’y aura pas de guerre… Je ne suis qu’un artiste.
- Mais vous pensez que les chansons sont toujours utiles ?
- Il faut savoir situer l’utilité. Mes chansons permettent aux gens de se relaxer, de passer un bon moment. On est sur le même terrain que TF1 mais on essaie de faire ça du mieux qu’on peut.
Vous voulez faire passer un bon moment aux gens, vous ne pouvez donc pas écrire pour vous ?
- Non ! L’exorcisme sur papier, ce n’est pas mon truc. Les mots sont fait pour communiquer. Je fais un métier qui s’adresse aux autres et quand j’écris c’est pour être compris par le plus grand nombre. C’est pour ça que ce métier est beau. Mes petites misères ou mes réflexions, on s’en fout complètement.
- Vous abordez de nombreux thèmes comme les PDG ou la famille. Vous puisez toujours dans le vécu ?
- Je ne me permettrais pas de parler de choses que je ne connais pas ! Mais le but du jeu est d’être suffisamment ouvert pour laisser de la place aux gens : c’est eux qui doivent donner un sens à ce qu’ils entendent. Les chansons qu’on écrit n’existent que quand elles sont entendues. À partir de là, il y a autant de vérités que d’oreilles pour les écouter.
- Sur cet album, certains textes ne sont pas de vous…
- Il y en a un de notre producteur, Christian Olivier des Têtes Raides, un de Gaston Couté et un de Roland Bacri, journaliste au Canard Enchaîné. Un texte qui a d’ailleurs été créé par Raoul de Godewarsvelde, véritable icône dans le Nord. Ils font partie de mon paysage et je suis content de rendre hommage à ma région.
En tant qu’auteur, vous n’avez jamais peur de la page blanche ?
Si mais je ne me force jamais sinon ce serait un vrai désastre. Je me laisse guider par mes émotions et je les rend accessible avec des mots. Finalement, ce que je raconte, on peut le comprendre de toutes les manières.
- Il y a une véritable osmose entre François Pierron et vous. Vous interférez sur sa musique et lui sur vos textes ?
- Bien sûr, ça ne va pas l’un sans l’autre. Le sens de mes chansons est conditionné par la parole musicale de François. D’ailleurs, la seule chose qu’on s’est dite avant de démarrer est : moi je parle mais toi aussi tu parles. Et on met ça en commun pour essayer de raconter quelque chose.
Emilie Munera
Loïc Lantoine Tout est calme (Mon slip/Wagram) 2006
En concert à l'Européen à Paris jusqu'au 2 décembre puis en tournée en France en 2007