Raoul de Godewarsvelde, de son vrai nom Francis Albert Victor Delbarre, est un chanteur français né en 1928 à Lille et décédé le 14 avril 1977. Son père était photographe installé dans un quartier bien connu des Lillois depuis 1919, près de la Mairie de Lille, "le quartier Saint-Sauveur". Il fut lui-même photographe officiel de la Foire Internationale de Lille. Dans sa famille on était "photographes de père en fils par tacite reconduction, maison fondée en 1919, on opère par tous les temps, même le soir !" selon ses propres propos. Très vite, sa forte stature (1 m 92 pour 120 kg) et sa voix grave et rocailleuse (il déclara, une fois, sur Fréquence Nord, que sa voix était due à une "laryngite de comptoir") font de lui la vedette du groupe "Les Capenoules" (fondé en 1966 par Jack Defer) mais il déclarera toujours « Mi, j’sus pas canteux, j’sus photographe ! » (Moi je ne suis pas chanteur, je suis photographe).
Les Capenoules - sur la route d'Sainghin
Il choisit alors le pseudonyme de Raoul de Godewarsvelde (Godewaersvelde étant un petit village des Flandres au nord de Lille). Bien vite, il le simplifia, en enlevant le deuxième "e" pour le rendre plus aisément prononçable. Bien que né dans la Lille de l'hinterland, Il était très attaché à la mer et surtout à la pêche. Il achète donc une maison au Cap Gris-Nez et troque son zodiac contre un flobart. Son amour de la mer se caractérisait également par sa casquette de pêcheur qu'il ne quittait que très rarement. Il fréquente au Cap Gris-Nez, notamment, trois grandes personnalités locales : Léonce, propriétaire de l’Hôtel-Restaurant du Cap Gris-Nez, Henri Beaugrand, le gardien du phare poète à ses heures et bien sûr Jean-Claude Darnal. Ce dernier écrira pour lui sa chanson la plus célèbre Quand la mer monte (vendue à 150 000 exemplaires), dans laquelle il évoque la vie de marin-pêcheur au Cap Gris-Nez et à l'estaminet de Léonce.
Le P'tit Quinquin
En 1975, il enregistre des chansons pour les Disques Adèle, la maison de disques, de Pierre Perret. Le 13 avril 1977, il dédicace ses disques à Boulogne-sur-Mer et termine sa journée avec son ami Léonce. Le lendemain, vers 7 heures, le menuisier Michel Legrand d’Audinghen, découvre Raoul pendu à une poutre d’une maison en construction non loin de la sienne. Il sera enterré quelques jours plus tard au cimetière d'Audinghen dans le Pas-de-Calais. En 1982, un géant à son effigie fut créé à Lille et participe depuis à toutes les processions.
Des artistes de la région ont rendu hommage à Raoul dans deux compilations nommées Un Hommach à vous ottes, où ils ont repris ses chansons.
"Les cigares" version studio, gravée sur l'album "Tout est calme" et sur la compil Hommage à Raoul "l'Hommach à vous ottes" La chanson « Quand les cigares… » a été interprétée et créée par Raoul de Godewarsvelde et apparaît sur l'album Mettez un verre à mes amis (1967) La musique est de Pierre Brunet.
Pour le petit hommage, une autre chanson de Pierre Brunet, qui était aussi chanteur : en 1959, il gagne une sorte de concours Marie-Claire où 4 musiciens sont élus "révélations de la chanson. Pierre Brunet est récompensé par l'enregistrement d'un 45 tours avec Roger Riffard, Anne Sylvestre et Jean-Pierre Suc.
Extrait de l'interview Chanson Boum sur France Culture en mai 2013 Hélène Hazéra : Tu es du Nord. Il y a toute cette vague de ch'noritude. Je suis pas sure que tu as tout aimé mais je ne suis pas sure que tu aies tout détesté de cette vague qui a quand même remis un petit peu à l'honneur le parlé local, par exemple. Donc j'ai voulu te passer un chanteur nordiste. J'étais partie sur un classique "Si j'avos su, j'aros reste garchon", j'me suis dit quand même, c'est un peu loin de son univers, et donc j'ai trouvé un enregistrement de Raoul de Godewarsvelde où il chante des chansons de 1925. Là, y'a le style vocal de Raoul de Godewarsvelde. C'est un cousin à toi quand même, mais quelqu'un de plus naïf, quelqu'un qu'est moins dans la poésie. Loïc Lantoine : Raoul, c'est un héros chez nous. D'ailleurs, j'suis toujours ravi d'l'entendre ... H. H. : Dans la chanson, c'est un héros. L. L. : Et puis même, c'est un personnage, il a son géant maintenant Raoul. C'est Raoul mais c'est les Capenoules aussi qui reprennent aussi pas mal de chanson du carnaval de Dunkerque. Y'a un côté festif, et puis après y'a les albums de Raoul très touchants. Moi, j'suis fou de "quand la mer monte". C'est une chanson, comme beaucoup de chanson, qu'on écoute quand on est petit, enfin, qu'on entend, qu'on n'écoute pas, puis il a fallu, peut être un jour, je sais pas quoi, 25 ans, me mettre à pleurer en écoutant "quand la mer monte" sans jamais l'avoir vraiment écouté avant. Mais j'ai eu la même histoire, d'ailleurs on la chante maintenant en concert, en écoutant pour la première fois, très tard, les paroles de "La Claire Fontaine" qui est une chanson que j'trouve sublime. Et Raoul, c'est vrai qu'c'est particulier, et j'suis ravi, en dehors du nord, qu'il y aie des gens qui s'souviennent de lui.
Quand la mer monte
H. H. : Dans l'histoire de la chanson, c'est vraiment un nom important. J'peux t'le dire en tant que vraie parisienne.
L. L. : Oui, mais on a du mal à s'en rendre compte parce que nous on est biberonnés à ça. H. H. : Oui, mais rien que sa voix, à l'époque, était .... cette voix un petit peu grasse, un peu éraillée ... L. L. : Puis alors il faisait tout un peu à l'arrache. C'est le premier album des capenoules, la femme de Jean Jacques Defer qui jouait dans le groupe, tenait un hôtel pour voyageurs de commerce. Ils avaient fermé l'hôtel, ils avaient dit aux gens, ce soir, on enregistre un disque dans l'hôtel, vous pouvez rester, y'aura à boire et à manger, c'est gratos mais par contre, ça va être le bordel. Et tous les coeurs qu'on entend, ce sont les voyageurs de commerce qui sont fins saouls, et qui chantent avec les capenoules. Les gars, ils avaint peur de rien. H. H. : Ca c'est joli ! Merci pour l'anecdote .... "tu s'ras jamais qu'un employé !" par Raoul de Godewarsvelde
Raoul reprend Bernard Dimey
Adieu pour un artiste Paroles de Bernard Dimey Musique de M. Blanchot
Loïc Lantoine : J'ai choisi quelqu'un qui est chez nous un héros. Raoul a même son géant à Lille maintenant avec une grosse branche de céleri pour les moules à la braderie. Raoul de Godewarsvelde, c'est très connu dans le nord, avec les capenoules. Chez nous c'est quelque chose de très populaire, certaines chansons très gaillardes, d'autres des monuments de tendresse, parce qu'il a eu quand même sa carrière nationale à travers de "quand la mer monte" ou des choses comme ça. Il a quand même été bien connu. Et puis j'ai choisi cette chanson là parce que le texte a été écrit par Bernard Dimey, et à son propos on parle de poésie populaire, et ça c'est vraiment quelque chose qui me mystifie ! [....] Qu'une musique soit populaire parce que pleins de gens la connaisse, j'arrive à comprendre. mais qu'on arrive à classer les gens comme ça ... et en même temps, par rapport à ces gens là, c'est plutôt manié comme un compliment ... mais je ne sais pas, je ne comprends pas parce que j'arrive pas à séparer la manière dont les poètes me touchent et des gens comme Bernard Dimey qui est connu pour avoir fait beaucoup de chansons, "mon truc en plume", "Syracuse", il en est l'auteur, mais aussi beaucoup de poésie sur le Paris des années 50, 60, 70 ... Bah voilà, moi j'aime ça, et la question est lancée, et populaire parce que Raoul, chez nous, c'est le top. Marie Richeux : Mais ça veut dire quoi que Raoul est populaire chez nous ? Ca veut dire que si on est dans un endroit avec plein de monde, cette chanson, elle peut être reprise en coeur, par coeur ? LL : Bah oui. Mais après, ça va être plus les capenoules, et aussi des musiques qui sont pointées au carnaval de Dunkerque et qui appartiennent ... elles sont un peu plus gaillardes, j'ai les joues rouges rien que d'y penser ... Mais c'est des choses qu'on partage et c'est transgénérationnel. Alors évidemment, faut attendre que les gamins aient épuisé leur Justin Bieber et tout ça, quoique c'est mélangé ... et après on se retrouve tous, et là ouais, de 7 à 77 ans, on s'amuse sur des airs qu'on connait. MR : Comment vous les avez apprises vous ces chansons ? Comme ça ? LL : C'est des chansons qu'on a le sentiment d'avoir toujours connu. Comme on dirait "A la claire Fontaine" ou des choses comme ça. [.....] MR : Et cette chanson de Raoul, quand est-ce que vous avez saisi ce qu'elle racontais ? Parce qu'en plus, elle est tout sauf festive cette chanson. C'est un homme qu'on met en terre, c'est un artiste qu'on met en terre, et on nous parle de la difficulté d'être, de la difficulté d'avoir toujours une joie de vivre, cheville au corps. Quand est-ce que vous avez compris, après l'avoir chanté enfant ou adolescent, c'qu'elle racontait ? C'est une chanson d'amitié aussi ... LL : Là, j'l'ai découverte plus tard parce qu'elle fait parti de l'époque de la carrière de Raoul qui est un peu sa carrière nationale, parisienne, et j'l'ai découverte plus tard et interprétée par un copain qui s'appelle jeHan, et aussi, à l'époque, je commençais à frayer un petit peu avec ..... on peut imaginer que ce genre d'enterrement, ce n'était absolument pas triste, ça a du bien rigoler, ça a du faire très mal aux cheveux le lendemain, et l'idée c'est ça, j'ai eu la douleur de vivre des enterrements pas marrants, des enterrements d'artistes qui parfois, on fait le choix de partir, et on s'est pas empêché de vivre, on a pris le meilleur, on a respecté un choix , et après voilà, c'était rock and roll ...
Mettez un verre à mes amis, un thème commun entre Raoul de G. et Loïc L.
Et à propos des chansons du carnaval de Dunkerque, reprises par les capenoules, on peut faire quelques comparaisons entre les versions de Raoul de Godewarsvelde, celle de Mon Côté Punk dans une chanson du Nord, et celle de Loïc Lantoine sur des rappels en .... légère errance ....
tout ch'ti la qui pice'
Tout ch’ti qui pice’, i tient s’biroute dins s’main, Et les tros quarts du temps, i’s’piche eune goutte dins s’main Et pis qu’i’s’la s’coue eud’n’importe quelle façon Eul’dernière goutte, ch’est pour l’caleçon Qu’est ce que vous en penser ? Bah ! Tout' les femmes, i’putent ! Tout' les femmes, i’putent ! Y’a qu’les hommes qui sintent bon Tout' les femmes, i’putent ! Tout' les femmes, i’putent ! Y’a qu’les hommes qui sintent bon Tout ch’ti la qui piche, i tient s’biroute dins s’main, Et les tros quarts du temps, i’s’piche eune goutte dins s’main Et pis qu’i’s’la s’coue eud’n’importe quelle façon Eul’dernière goutte, ch’est pour l’caleçon Tout' les femmes, i’putent ! Tout' les femmes, i’putent ! Y’a qu’les hommes qui sintent bon Tout' les femmes, i’putent ! Tout' les femmes, i’putent ! Y’a qu’les hommes qui sintent bon Tout' les femmes, i’putent ! Tout' les femmes, i’putent ! Y’a qu’les hommes qui sintent bon Tout' les femmes, i’putent ! Tout' les femmes, i’putent ! Y’a qu’les hommes qui sintent bon..... Qu’est ce que vous en penser ? Oh ! Ouuuf !
Version Raoul de Godewarsvelde et les capenoules :
Version Loïc Lantoine - Live à Nantes
Une autre version, mais mixée avec d'autres textes, "Exprimer", une chanson du nord, on retrouve les paroles du ch'ti qui pice' vers la fin de la chanson, c'est en live, c'est Mon Côté Punk et Loïc Lantoine fait encore partie intégrante de la bande.
Trombone à coulisse de mes quinze ans Tous les sam'dis soirs je soufflais d'dans Ca tourbillonnait jusqu'au matin, au p'tit jour Papa passait la main Ils avaient danser douze heures durant, on avait fait le tour du cadran Mais on été frais comme des gardons, on se tapait la soupe à l'oignon La musique à Papa! La musique Papa! La musique à Papa fait plaisir à Maman! La musique à Papa! La musique Papa! La musique à Papa fait plaisir à Maman! Les moustaches en crocs, les yeux brillants Fallait voir mon père tambour battant Faire tourner la tête à tout l'pat'lin, tandis que Maman rongeait son frein Mais quand il rentrait à la maison, ce n'était plus du tout la même chanson Quand il jouait pour elle, pour elle seulement, Je crois bien qu'il changeait d'instrument La musique à Papa! La musique Papa! La musique à Papa fait plaisir à Maman! La musique à Papa! La musique Papa! La musique à Papa fait plaisir à Maman! Depuis ce temps là, moi, j'ai grandi. Je peux dire que j'ai vu du pays Je n'ai rien oublié, non vraiment rien de ce que Papa faisait si bien Et si maintenant j'ai quarante ans, si je suis jovial et triomphant C'est que j'ai gardé les instruments dont Papa jouait si brillament La musique à Papa! La musique Papa! La musique à Papa fait plaisir à Maman! La musique à Papa! La musique Papa! Je sais qu'on la jouera longtemps! La musique à Papa! La musique Papa! La musique à Papa fait plaisir à Maman! La musique à Papa! La musique Papa! La musique à Papa fait plaisir à Maman! Version Raoul de Godewarsvelde :
Version Loïc - Live à Nantes
Les cigares
Loïc Lantoine reprend une vieille chanson du patrimoine ch’ti de Roland Bacri, "Les cigares", créée par Raoul de Godewarsvelde, chanteur nordiste mythique : «Quand les cigares y changeront d'bouche / Quand les stars elles changeront de mains / Quand la bonne soupe elle changera de louche / Qui qui sera dans le Bottin ?»
"Les cigares"sur scène, Ch'ti teuf, Festival de Marne, le 14 octobre 2007
"Les cigares" en direct de l'émission d'Effie sur France Bleue Nord, Loïc Lantoine est invité avec Joe Doherty et Fil, émission du 11 mai 2013.
Effie : La reprise, c'était une sacré surprise, et quand je disais affectivo-régionale .... parqu'il y a beaucoup d'affect, de la région dans cette chanson, qu'on a déjà entendue, Loïc, si vous voulez bien me rappeler la chose, sur "l'Hommach à vous ottes", une compil où pleins de groupes régionaux reprenaient des chansons de Raoul (de Godewarsvelde), en l'occurence c'est une chanson de Raoul" Loïc Lantoine : "Oui. C'est une chanson que je connaissais pas bien .... comme tout le monde ici, j'ai quand même été biberonné quand même un p'tit peu à la Raoul, au "Capenoules", et c'est Frédérique Delbart, la fille de Raoul de Godewarsvelde, qui m'avait parlé de cette chanson, et ce qui est assez amusant, c'est que, moi j'ai chanté du Raoul, et quand on a sorti le 2ème album qui s'appelait "tout est calme", la musique était de Pierre Brunet, les paroles de Roland Bacri. Et alors moi, j'me baladais en interview, et nombre de journalistes parisiens me regardaient avec de grands yeux : "mais alors, Roland Bacri .... Roland Bacri ?" "Bah oui euh ... " J'connaissais pas ... "Mais Roland Bacri !" avec des yeux admiratifs. Et il se trouve que Roland Bacri, je l'ai rencontré après, il est venu nous voir, d'ailleurs c'est un vieux monsieur maintenant, il écrivait dans le "Canard Enchainé" , et j'me souviens d'ça d'ailleurs, c'est celui qui commentait en première page l'actualité en vers, et qui est une figure du journalisme rentre-dedans. Voilà, c'était assez marrant pasque moi, je portais toute mon admiration pour Raoul et j'étais accueilli par des journalistes qui étaient, eux, touchés par l'admiration qu'il portaient à Roland Bacri qui a écrit cette chanson pour Raoul "quand les cigares"