Extrait de l'interview d'Effie sur France Bleue Nord

Effie : Qu'est-ce que vous racontez dans vos chansons ? C'est difficile à dire, ça, c'est presque une dédicace, enfin pour "Je ferme", il y en a d'autres, des chansons, on a l'impression que vous parlez à pas mal de gens que vous avez rencontré, y'a une chanson qui s'adresse aux potes de la rue Kétanou par exemple .... C'est quoi dans vos chansons ? Qu'est ce que vous y mettez de vous et des autres ?
Loïc Lantoine  : Moi, c'que j'y mets, c'est ce que je suis. Mais l'idée, c'est quand même d'aller du particulier au général. Une chanson, c'est pas destiné à m'appartenir, ni, s'il m'arrive de penser à quelqu'un en écrivant une chanson, certainement pas non plus de maintenir un lien entre nous. Une chanson, ça appartiens aux gens qui l'écoutent. Y'a autant de vérités que de gens qui écoutent nos chansons. Alors, moi forcément, je travaille uniquement sur des émotions, j'ai envie de dire, peu importe ce que j'écris. L'idée, c'est que quand je pose le stylo et que je relis ce qui a été marqué, j'ai encore cette émotion là intacte. L'idée c'est de la faire recréer. Une chanson, pour moi, elle est belle .... mais c'est pas une chanson qu'est belle, c'est les gens, si ils ressentent quelque chose de beau, c'est eux qui sont beaux. C'est pas la chanson. C'est un outil. J'suis un mécano d'l'émotion. 
Effie : Un mécano des mots ...
Loïc Lantoine : Ca va pas plus loin.
Effie : Vous mettez du temps à écrire une chanson ?
Loïc Lantoine : Non, je suis pas un bon ouvrier. J'écris assez vite, justement pour maintenir ces affaires d'émotions. 
Effie : Cette spontanéité ?
Loïc Lantoine : Oui, il m'est arrivé de temps en temps de retoucher 2 ou 3 mots, mais non, en général, c'est une affaire d'une heure, une heure et demi maximum. 
Effie : Quand ça sort, faut qu'ce soit donné comme c'est sorti en fait ?
Loïc Lantoine : Bah après, j'm'embête !

Dans les débuts de Loïc Lantoine et François Pierron, 
quand la chanson était vraiment presque pas chantée, 
Loïc Lantoine s'est essayé, pour suivre la tradition 
des chansons à textes contre les chansons sans texte, 
à faire un texte ... à texte .... sur la pluie et le beau temps ...
C'était en février 2000 à l'Ailleurs  ...





Interview "Elles et Eux de la chanson" du 24 octobre  2005
Quand vous dites bouffon, vous ne faites pas que faire rire les gens, vous les interpellez aussi.
Loïc Lantoine : J'essaie de réveiller notre tronc commun d'émotions, d'aller chiper chez les humains leurs émotions, celles qui font rire et celles qui font pleurer, et de les restituer de manière que nous les partagions. Je chipe toutes ces émotions et je les remets en habits du dimanche pour les faire belles et émouvantes, c'est du vol mais cela ne dure pas longtemps : je restitue tout de suite et je donne du supplément.

 
« J’aime les cafés parce que c’est mon église
C’est mon bureau à la fois.
J’aime bien y écouter les gens, y voler leurs paroles.
C’est les gens en fait qui écrivent leurs chansons.
Nous, on est là, on est des scribes,
On récupère et puis on en fait quelque chose,
On magnifie et puis on redonne. »
 
Allain Leprest


....
Est-ce que cela vous fait plaisir d'être aimé quand les gens vous écoutent ? Pour vous, le mot amour est important non ?
Loïc Lantoine : Oui, mais il faut faire attention. Moi, je fais des chansons et j'espère que ceux qui viennent les écouter et qui les aiment ne confondent pas avec le bonhomme parce que s'il y a une personne à aimer après avoir apprécié une chanson, c'est soi-même, c'est soi qui fait l'effort de l'écoute, de la compréhension. Sans cet effort, la chanson n'existe pas. Il a écouté en mettant en branle ses émotions, s'il ne fait pas ça, la chanson ne sert à rien, elle n'existe pas.

.....
Le public a besoin de venir vous voir et vous avez besoin de lui pour exister.
LL : Absolument, quand les gens me disent qu'ils n'écrivent que pour eux, je n'y crois pas, c'est encore une séance de gamberge, parce que l'écriture, c'est justement l'art par excellence qui doit se partager.
Nous amplifions la réalité de l'histoire pour nous faire comprendre. La poésie simplifie cet état. La poésie est faite pour aller vers les gens, qui s'en emparent et transforment opiniâtrement ce que le chanteur vient de proposer avec ses mots et sa propre musique. Un bouquin qui dort sur une étagère, cela ne m'intéresse pas, mais un bouquin dans les mains d'un être vivant, cela ma passionne. Les amateurs peuvent se réapproprier la poésie comme ils l'entendent. Il y a un monde, c'est un passage entre les gens, il y a la proposition du chanteur et la transposition du spectateur.




Extrait de l'émission "dans les oreilles de Loïc Lantoine"
Loïc Lantoine : La feuille blanche, c'est pas ma copine. J'ai besoin d'évocation. Ca peut être des gens, tout ce qui me procurer des sentiments. Et la musique, encore une fois,  encore une fois, comme elle est magique un peu pour moi, elle me mets dans des sentiments particuliers. En ce moment, j'demande à pleins de gens musiciens que j'connais d'me donner le titre d'un album qui, pour eux, est très évocateur et qui leur donnerait envie de créer. Et même, pour créer le dernier album, on a fait la plupart des chansons la main dans la main avec les copains qui improvisaient, et de temps en temps j'les arrêtais sur quelque chose qui m'faisait vraiment d'l'effet. J'écrivais quelques mots, une fois qu'c'était bon, j'allais m'isoler et j'finissais ma chanson. C'est marrant, y'a pas mal de classique, mais y'a aussi du joy division, des trucs que j'connais pas du tout ..... c'est assez marrant ... 


 
Joy Division - Love will tear us apart

Comment compose t'il ?
Loïc Lantoine : Moi, quand j'écris, c'est uniquement sur des émotions qui me guident. Et c'est pour moi le plus important, le but, plus que le propos en fait. C'est à dire que l'idée c'est d'être ému, alors ça peut être un sentiment de colère, un élan de fraternité, une tendresse amoureuse, peu importe, et peu importe ce que je vais raconter en plus. L'idée c'est que au moment où je mets un point final, je relis le papier et qu'je sente encore cette émotion exister. Parce que, finalement, une chanson, ça n'appartient pas à son auteur. Elle a autant de vérité que de gens qui l'écoutent. C'est plus une proposition. J'aime pas l'idée de prendre trop les gens qui vont nous écouter par la main, moi, faut pas trop interpréter, faut pas trop en mettre. L'idée c'est que les gens fassent leur petite cuisine. 
J'ai déjà fait aussi du Gaston Couté, j'm'amuse régulièrement avec Michaux aussi. C'est à dire qu'moi j'ai démarré la chanson, ....  j'me dit chanteur parce qu'il faut trouver un nom, je chantais pas, j'me présentais en faisant d'la chanson pas chantée, c'qui nous a piégé un peu, donc, l'intéret de cette forme d'expression, c'est que j'ai pas à m'caller, y'a pas d'musique à proprement parler, y'a la musique qu'est propre à la grammaire poétique, et puis y'a la musique du camarade, c'était François à l'époque qui faisait les musiques, qui apportait une parole à lui, et on s'faisait fracasser les deux. Et c'était assez agréable, même carrément beaucoup. Donc j'entends pas de musique à proprement parler et j'essaye de respecter la grammaire du poète en essayant d'en faire pas trop. 
J'associe forcément la musique que mes copains étaient en train de jouer à ce moment, j'étais vraiment focalisé là dessus, c'est à dire que c'était la première fois qu'ils travaillaient ensemble, donc on s'retrouvait en résidence, et j'étais complètement baigné dans leur musique. Y'a Joe Doherty qui jouait dans "Sons of the desert" qu'est quand même très rock'n roll, c'est un irlandais qu'a pas la même esthétique que François Pierron avec qui j'ai toujours travaillé qui a des goûts très variés, mais qui à l'origine vient d'un milieu plus chanson, on a un batteur un peu fou qui lui, n'a peur de rien, Fil fait de la guitare un peu plus classique, c'est un grand ambianceur, alors à les voir travailler ensemble, ça me plaisait, j'étais baigné là dedans et je ne pensais qu'à ça. 


 
Alain Pilot : Quelle est sa part dans la composition, dans l'écriture de vos chansons ?
L. L. : La part de François ? Elle a évolué forcément puisque maintenant, on est plus. Y'a des morceaux qu'on a fait encore en tête à tête ... après c'est une écriture qu'est collégiale ...   J'ai aimé préparer cet album (J'ai changé) comme ça. On a fait plusieurs résidences, dans des gites .... chacun avec ses instruments, et puis en fait, ce sont tous des improvisateurs aussi, donc ça boeuf. Et puis d'un seul coup coup, j'arrête les copains, j'leur dit stop ! Vous pouvez vous arrêtez là dessus parce que là, j'ai une émotion particulière qui vient de naitre, et puis, le temps de jeter quelques phrases sur un bout de papier, j'leur dit, c'est bon, repartez dans vos bêtises. Et moi, j'm'isole le temps d'finir l'affaire. 
A. P. : Régulièrement, quand on a écouté des chansons de cet album, vous avez retiré votre casque. Vous n'aimez pas vous écouter ? Vous n'aimez pas vous entendre ? 
L. L. : J'vois les coutures, j'entends les endroits où j'aurai pu faire autrement. Les chansons pour moi, elles m'appartiennent pas, elles sont projetées, c'est pour ça que j'adore faire de la scène. Une chanson a autant de sens que de gens qui l'écoutent. Alors forcémment, je préfère les laisser vivre. Et puis penser à la suite, que de m'écouter au casque, en plus, avec un son très flatteur comme ça, où j'me d'mande pour qui j'me prend. Forcément, pour faire des spectacles faut en rajouter un p'tit peu mais, j'ai l'impression d'être un gros craneur quand je m'écoute au casque. 
A. P. : Mais vous êtes un gros craneur ... (rires)
L. L. : Un p'tit peu quand même ! (rires)
(écoute de Rude chameau)
A.P. : Ah ! Ils se sont pas foulés pour la fin là  (rires) .... C'était prévu cette fausse fin ? 
L. L. : Non
A. P. : C'est tel quel ?
L. L. : Bah oui, on garde ! .... C'est difficile .....  le studio, c'est quand même un exercice très difficile, et si on est trop appliqué ..... Evidemment qu'il faut du temps pour bosser en amont et tout ça, mais trop appliqué, ça donne quelque chose de froid, et là, donner la preuve à tout le monde que mes copains sont des imbéciles, ça me fait bien plaisir  ! 
......... 
A. P. : Pourquoi ce besoin d'être entendu ?
L. L. : C'est mon métier qui veut ça ! Vous savez l'écriture, bien sur j'ai un respect pour les mots, mais pour moi, ce sont des outils. Et puis si je pratique ce métier, c'est pour faire passer un moment à des gens. Sinon, rien ne vaut une bonne gamberge plutôt qu'une séance d'écriture. Voilà, c'est mon métier ! J'en ai un ! 
A. P. : C'est bien ! 
Depuis combien de temps ?
L. L. : Et bien, on se demandait ... on va dire 13 ans .... j'espère que ça ne va pas me porter malheur en traversant la route en sortant d'ici ! 

 



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